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« Dans l’½uvre, l’homme parle, mais l’½uvre donne voix, en l’homme, à ce qui ne parle pas »
(Maurice Blanchot, in « L’espace littéraire »)



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D’après Chantal Morcrette , Y.Rzouga s’inscrit dans un contexte «d’un grand chambardement d’une marche inévitable :l’Enfant joue dans la cour des grands, le regard lancé vers l’avant. Pour présenter Youssef Rzouga, dit-elle, c’est annoncer un spectacle ouvert, un jeu, un ballet, grandiloquents, où théâtralité et quotidienneté se rejoignent. Les décors sont ordinaires ou extra-ordinaires, les costumes modernes ou classiques, la sensibilité grave ou enjouée. Mais toujours, derrière le complet cravate qui habille l’Artiste, c’est mille et une silhouettes qui se profilent pour colporter le monde à travers le c½ur. Sur le chemin de Y.Rzouga, il y a l’Orient qui côtoie l’Occident, la terre qui prend l’accent de la mer à en devenir bleue, l’ambition et la réussite, l’extraversion et la simplicité, le loup et l’homme côte à côte qui disent la vie…Et toujours, cette force originelle d’une main qui se tend vers l’autre. Dans les jardins de Rzouga, la poésie est une fable, le Poète un aventurier. La route qui s’ouvre est tortueuse, mondiale, son ascension incontournable ».

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Refonder la relation perdue entre le langage et le monde. Retisser les liens fondamentaux du dialogue entre les hommes. Repenser la rencontre afin qu’elle ne donne plus sur l’incompréhension, la haine et la méfiance, mais serve de lieu de rapprochement et de symbiose créative, d’espace de perception et d’imagination transcendante.

Pour Youssef Rzouga, toute rencontre est plus qu’une présence, une action stimulante, poétisante, transformante, puisqu’elle donne lieu à une relation fondamentale entre les êtres et les consciences. Toute rencontre engage. Elle engage dans le chemin de la paix et de la sérénité pour atteindre à l’euphorie.

Il y a, en effet, pour ce poète une vérité de l’euphorie qui puise dans le rêve. Le rêve substantiel. Non pas celui vécu comme opacité à tout langage intelligible, mais celui ouvert sur la vie totale ; celui significatif des désirs de communion, étant défini comme une force - inconsciente - de fusion avec le regard de l’autre. Cet autre qui peut éveiller un sens de paix et de fraternité par-dessus les querelles et affrontements de l’histoire.

L’autre est, donc je suis



Cet être porteur d’un désir de communion vient du Nord de l’Afrique, c'est-à-dire de ce que la géographie arabe désigne par le vocable d’El Maghreb, aire tapissée d’histoire et de langues, étalée sur ses immenses richesses punique, grecque, latine, vandale, byzantine, arabe, turque, française. Espace de terre tournée vers la mer avec la ferveur d’une passion nommée orientale, ayant constamment triomphé de la raison.

Pourtant, la grande route du maghrébin rampe sur l’horizon de l’homme dans sa grande diversité, dans sa profonde différence : qu’il soit européen, asiatique ou américain, il appartient toujours au même moule de la fraternité. A l’instar du grand poète voyageur dont il s’agit et qui vient de la Sverige (ou Suède), pays de forêt et de densité qui dès 1800 av.J.C construisit des ponts avec la Méditerranée et qui, malgré son appartenance à la sphère raisonnante du cogito cartésien, avait enfanté de grands poètes rompus à la trame poétiquement spirituelle à l’instar d’un certain Gunnar Ekelöf.
Youssef Rzouga, poète du Nord de l’Afrique, né en 1957 à Ksour Essef* en Tunisie, a rencontré Gunnar Ekelöf, poète de la Scandinavie, mort en 1968 à Sigtuna. Ils se sont rencontrés à l’isthme d’une vision nourrie d’une substance nouvelle, d’une matrice fondatrice d’un nouveau langage.
Ekelöf se réveille un jour en sursaut pour croquer un rêve oriental ; il atteint à une autre position de l’esprit qui lui permet de tisser un nouvel univers poétique. Il se détourne totalement de la réalité du temps mécanique et embrasse les révélations des mots et des lieux. Il constate que le monde est aussi celui des grandes passions où la piété sauvage tient lieu de sens radical. Il se nourrit alors abondamment de songes orientaux jusqu’à inventer un nouveau murmure de l’invisible, ourlé de lumière et d’échos. Il creuse dans les effets d’ombre qui mènent à l’absolu du feu et du néant. Entouré de la densité aqueuse de sa demeure première, il fait un rêve de lumière. Les mots deviennent polis aux lueurs étincelantes de l’Orient.
Ekelöf quitte les rivages de l’Europe pour explorer un nouveau chemin d’accès à d’autres vérités. Sous l’effet implacable du rêve. Et aussitôt tout s’effrite, tout s’effondre pour naître à nouveau. Et que reste-t-il de son monde glacé ? Les souvenirs ! Ekelöf se souvient que Descartes, visitant son pays, s’était déjà persuadé qu’ « il n’y avait rien du tout dans le monde, qu’il n’y avait aucun ciel, aucune terre, aucuns esprits, ni aucuns corps », avant de découvrir : « mais il y a un je ne sais quel trompeur très puissant et très rusé qui emploie toute son industrie à me tromper toujours. Il n’y a donc point de doute que je suis, s’il me trompe ; et qu’il me trompe tant qu’il voudra, il ne saurait jamais faire que je ne sois rien, tant que je penserai être quelque chose ». Ce doute radical, pensé, intériorisé, se transforme en ombre transformatrice. Ekelöf croit à la nécessité de sonder la nuit pour « briser les lettres de l’alphabet » et renaître neuf, capable d’inventer une nouvelle langue réellement représentative du monde de la pensée. Mais celle-ci peut être cartésienne pour le poète ; elle relève de l’ordre de l’affect, de l’émotion, de l’intuition, de la conscience mystique, des profondeurs de l’âme secrète, silencieuse et rebelle. Le salut ne vient pas. Le salut ne vient pas de ce que je suis, mais de ce que je ne suis pas, car je est un autre en vérité.
Toute parole occidentale est refoulée dans l’inconscient oriental. Longtemps figés dans le silence des espaces blancs, les mots finissent par accéder à la trame voyageuse d’un Ibn Arabi(1). Ils s’exaltent hors de l’oubli pour embrasser les origines ; ils se recomposent au rythme ascendant d’un divan de chant et de rêve pour briser les frontières du temps. Ekelöf dit : « donne-moi du poison pour mourir ou des rêves pour vivre ! », Et, hors du temps et de l’espace où sa voix s’était diffracté, en tant que force étrange et évocatrice de l’oubli, s’imprime, puissante et extatique, la maïeutique d’un poème d’outre tombe :
« Vivre pour rêver
Et rêver pour vivre
Ivre d’un peu d’O2

vivre pour rêver
Et rêver pour joindre l’ultime cri d’un corbeau
Au premier cri strident d’Adam

Vivre pour rêver
Et rêver pour rimer tout un monde fou
Selon l’absurde sourire de la Joconde

Vivre pour rêver
Et rêver en symbiose surtout
Pour les jours qui viennent » (Y. Rzouga)

Ici, chaque mot qu’impose le poème n’est plus seulement le moyen de formuler et de désigner l’objet ; il est le reflet, l’image forte de moi-même regardant l’autre dans sa vérité profonde. Il est du « moi » qui ne peut être dissocié de l’ « autre ».
A l’affût des fourvoiements obscurs de l’être total, la poésie nous rend la saveur mystique de la pureté du monde ; elle dit les choses comme elles sont, sans se soucier des miroirs qui peuvent être déformés, détournés ou brisés.
La force du symbole n’est–elle pas de faire apparaître des liens que l’observation rationnelle ignore ? Y. Rzouga est à l’affût de ce symbole unique, universel, uni fondamentalement et sémantiquement à toutes les cultures du monde. Symbole capable de générer l’euphorie originelle de l’homme et de son monde. Symbole capable de nous transformer afin que nous éprouvions notre unité radicale qui dépasse de loin nos différences culturelles et religieuses.
Rzouga ambitionne d’avancer d’un pas, cherchant furieusement les traces où l’autre s’est évanoui.
Ekelöf avait succombé au jaillissement des lumières méditerranéennes, en Turquie notamment, où il avait tenté d’ épuiser en un seul jet la torture et le temps. Il avait usé des variations musicales dissimulées dans le fond substantiel des mots, dans une pathétique tentative d’abolition des frontières du moi occidental. Sur le corps des langages, il a gravé des diwans : poésie ascétique, entêtée, interlocutive jusqu’à la racine des idées, constituante, diffractée sur plusieurs chemins de l’infini sonore, simple et profonde jusqu'au vertige du mouvement des eaux. A poésie méditative, un visage serein.
Le visage d’Ekelöf est en apparence tourmente, tourné vers les sentiers impétueux du vent ; il est serein en profondeur, plongé dans les paysages silencieux de l’esprit avec de grands yeux ouverts sur les lueurs de la terre. Visage gravé d’un don de ciel pour pénétrer la conscience du mot, dispersé sur mille rayons de lumière, imbu d’une sorte de « joie – panique ».
Ekelöf possède le don de sentir continuellement palpiter en lui le vertige de l’esprit ; stridence de lueurs. Folle lucidité générée par un étrange voyage au c½ur d’un écho de cristal. Ce poète a puisé dans les chemins imprégnés des vibrations mystiques, d’Istanbul à Mahdia : Fleurs cristallines, totales, vives, brûlantes. Pur amour abreuvé d’éternité reconquise. Et chaque fois que le poète écrit un poème sur Fatumeh, son large front clair s’agrandit encore pour s’ouvrir à toutes les autres substances de l’histoire à faire. Celle que Y.Rzouga harcèle sans cesse avec les mots creusés au ras des c½urs, dans les planètes incandescentes, dans les élans brusques où se forgent les pays blancs, dans l’encre immatérielle de la terre originelle, dans les états d’alerte extrême, dans les zones d’épouvante, dans les « fleurs du bioxyde de l’histoire »* !
S’il y a quelque tourment qui habite Ekelöf, c’est bien ce « je suis » qui l’éloigne de l’essence de l’autre : « entre moi et soi, dit une sentence d’El Hallaj(2), il y a un « je suis » qui me tourmente. Ah ! Enlève par ton « je suis » mon « je suis » d’entre nous deux ».
Assurément, ce « je » se trouve à la source de ce qui nous sépare, de ce qui nous divise, de ce qui nous éloigne. Le poète est toujours conscient que les concepts de tolérance et autres prétendus remèdes à la source des conflits entre les hommes et les nations, ne sont qu’un palliatif à la tragique incapacité de l’homme à abolir en lui l’opprobre de la monstruosité.
Alors, que faut-il pour entrer à cette « plénitude incommensurable de l’être » ? Il faut redécouvrir l’Orient et l’Occident. Redécouvrir l’Orient dans sa vérité dénuée de tout exotisme. Réinventer le langage. Réécrire la poésie. Construire une nouvelle loi rythmique au c½ur de l’expérience poétique universelle.
Aveuglé de lumière, le poète voit bien la nuit de l’homme ; il voit bien le fiel remonter la gorge des désespérés de la terre.
Le chant substantiel est-il désormais tôt au tard surgi ? Combien de fois Ekelöf a-t-il songé à la nuit « grenadine » lorsque la méconnaissance de l’autre avait atteint son paroxysme ? Sur la porte de l’Espagne, il avait lu :
« Ceux qui portent les noms arabes sur les livres,
Qu’ils ne regardent pas leur sang
Car ils ont été plantés dans ce jardin traversé de tant de peuples
Que nul ne peut dire sous la tente de qui sa mère a couché.
Les voilà comme des graines dans la paume andalouse si bien mêlés
Que le Maure a les cheveux jaunes
Son frère a la nuit sur sa peau.
Qui peut dire où commence le Juif ou l’Espagnol et pas même à son Dieu tu ne peux le reconnaître.
Combien de nous sont les mulets de deux croyances ? »

Ecrire les semences



Il ne suffit pas d’inventer le beau, encore faut-il écrire les semences de l’autre. Rêver en symbiose jusqu’à toucher au brasier de la vie totale. Remuer le souffle, l’inspiration et la fêlure. Remuer le feu de l’être jusqu’à réinventer ses passions, ses désirs. Par un retour sans complaisance à son cri premier.
Le rôle du poète ne se limite pas à la poétisation de ce qui est déjà visible. Il doit s’atteler à rendre visible. Car toute l’imagination n’engage pas l’objet mais le regard.
La poésie d’Ekelöf a montré que ce qui, dans le monde, est à voir, n’est que ce que l’imagination permet de percevoir. La présence de l’étantité physique ou spirituelle, sa forme même, ne sont saisissables que lorsque le regard s’ouvre à la totalité de la lumière.
C’est un sens poétique exacerbé (ce que Kant(3) appelle « l’intuition interne de l’imagination ») qui a permis à Ekelöf de découvrir le monde de Y.Rzouga, celui déjà né et celui à naître à distance de son auteur déjà annoncé et presque présent, et vice-versa.
Potentielle réflexion d’une rencontre saisie par le regard spirituel. Rencontre qui dépasse, chez Y. Rzouga notamment, la dualité poétique pour embrasser une totalité d’être. Elle est d’ailleurs, chez ce poète, une invite à l’union, à la symbiose. Sa poésie n’est-elle pas un tissu à l’image du monde qu’il ne cesse de construire ? Dans la vision du poète, le monde est un « tissu » qu’intègre l’homme indépendant dans ses apparences. L’homme s’y incorpore, tel un fil de soie. Cette vision rejoint d’ailleurs celle de Rilke(4) : « tu es venue t’incorporer, fil de soie, au tissu». Le champ de réflexion de l’imagination du poète comprend la configuration compacte, complexe, sinueuse et mystérieuse de ce tissu. Il est d’oubli radical mais qui fait vivre dans le souvenir des origines. Filage du monde tel qu’il peut être idéalisé dans le territoire vaste du rêve. Ekelöf l’a exploré jusqu’à remonter à ses sources premières et vives. Surgissement de transcendance au c½ur du poète transi. Et au milieu de traces diverses, la poésie flottante. Celle qui ne s’embarrasse d’aucune amarre et se saisit des ports de l’être pour mieux rebondir. Le poète reproduit le monde non pas en tant que modèle objectal mais en tant qu’intuition d’un sens ultime de création. Alors que d’autres sont « contraints » de jouer le rôle de ce qu’ils ne sont pas (« on est contraint de jouer le rôle de ce qu’on est hors de soi », écrit Pierre Klossowski (5)), le poète est substantiellement et par nature à la fois ce qu’il est et ce qu’il n’est pas, étant capable de se forger cette totalité d’être poétiquement et existentiellement. Y. Rzouga nous en donne la preuve la plus éloquente, lui qui est capable de s’inventer, c'est-à-dire d’écrire en ce lieu de profondeur où l’affect se mesure à la dimension des temps autres. Seul importe le pouvoir du langage. Et la force évocatrice de la trace à chaque mot se déploie comme une représentation. Le poème déroule le temps et le monde. Les lettres grouillent de trouvailles jubilatoires :

« Tôt sur la terre
Afin de dire à tout le monde
Le jour repère de tout le monde
Ne tarde pas à venir
Demain peut-être
Ou après demain
Sous l’impact de big-bang
Ou avec le soleil
De cinq milliards de soi-disant malins
Qu’en dites-vous Ekelöf ?... »
(Y.Rzouga in |Tôt sur la terre,Imagine 3D,Tn,2006 |)

Fatumeh*



Sur son front Ekelöf a gravé une troublante chaleur, une stridence d’encre bleue, un vertige du Nord. Face aux visages, une ultime alchimie occidentale susurre comme un aveu d’amour suprême. Le choc fut intense jusqu’à la mort.
Dans les habits du temps, les parures du vers vert. Le vert brûle, en effet, sous les paupières des villes de l’Orient. Chaque lumière est d’ombre puisque la vie n’est qu’un voyage.
Et quel chemin ne conduit-il pas à l’absolu de lumière comme l’enseignait Ibn Arabi ? Dans la peau des visages et des paysages tus, l’appel d’une lente dérive, embarcation pour l’éternel.
Quelque chose d’obscur remue dans le ciel. Une force nocturne que l’on ne peut saisir que de l’essence de sa propre force intérieure. Elle ouvre sur l’indicible. De toutes parts l’intimité de l’étrange où s’engouffre, béant, le silence. Invisibles coups de lumière intemporelle, couronnés d’éblouissements sur la mémoire du poète.
Dans le silence intégral d’Istanbul, Ekelöf écrit pour le poète de l’orient à des années de distances. L’heure qui devait le rendre immortel avait sonné dans l’âme du vers, sur les rivages de la mer soyeuse. Le feu de Fatumeh était ambré d’un manuscrit de chair. Le ciel était lourd d’orage ; la terre versée dans l’instant de nullité pour céder l’espace aux fulgurances. Le temps de l’exode avait commencé. Par le poète seul, en lui-même, aux sources du chant, la pureté d’un regard transcrit sur le front de l’Orient.
« N’as-tu pas entendu son pas silencieux ? Il vient, vient, vient, à jamais »(Tagore)

A Ksour Essef, sur les rivages de son chant, Ekelöf a gravé l’humilité.
Pont-matrice où prennent naissance les ports jetés dans la mer.
La mer nourrit le poète. Sa poésie s’invente à son rythme. Elle est toujours tournée vers la ligne du départ, lieu en lequel se rêve le relief symbiotique du langage. Un projet matriciel qui renoue avec la totalité de l’être dans l’absolu de sa rencontre ou dans la virginité de son face à face avec le territoire de l’autre. Plénitude qui ne peut être fidèlement rendue que par le langage poétique. Le seul qui puisse dérouler le traité des passions de l’âme, loin de Descartes et de son cogito. Magistrale voie de dépassement en mesure de bouleverser notre perception du monde.
De partout Mahdia appelle au départ au plus plafond de l’âme. Au c½ur des signes, son port, ses rivages et ses terres intérieures, ses plaines à Zorda abreuvées de quiétude et de solitude dans la nuit profonde des rêves. C’est à 20 km de Ksour Essef, à Zorda que Youssef Rzouga est né et que son imaginaire a appris à prendre la mesure primaire des traces pour les retranscrire, les recréer, les saisir à bras-le-monde au rythme des marées de la rhétorique arabe. Mais bientôt il parviendra à forger son propre rythme sur la crête des terres. Image subliminale. Chaque poème portera l’audace de son propre territoire. A travers ses chants, l’on sent battre l’efflorescence de la terre lancée dans le tourbillon fougueux de la vie. Sa poésie caresse l’être-au-monde, l’interpelle, le sollicite à le joindre sur la lumineuse conscience de la totalité de l’homme. Youssef Rzouga habite les mots comme une tunique enchantée pour nous rappeler au bout de chaque poème : « ...Aussi nous faut-il devenir » : Chaque lettre, chaque mot, chaque vers qu’il écrit traduisent l’immédiateté d’un embrassement intérieur ; son esprit est le siège de tous les « sentir », au seuil d’un assentiment total au monde. Volonté d’affirmation et de transformation. Par le biais d’un langage frénétique qui célèbre toute marche vers l’avant, tout rebondissement vers un autre itinéraire de sens, vers un autre écho, une autre rémanence.
Y.Rzouga écrit en éclaireur de langages. Il sait que c’est au carrefour des rencontres avec la géographie et l’histoire humaines que se nomment les départs. Il a déjà rencontré Edgar Allan Poe(6), Maiakovsky(7), Thomas Eliot(8), Abou Nawas(9), El Maârri(10), Aboulkacem Chabbi(11) et mille autres pas sur l’horizon brumeux de son regard. Il a traversé la « terre vaine », le vide et la futilité de l’existence. Mais il n’a pu s’accommoder avec l’insoutenable néant de l’être ; car s’il faut remonter le temps et la géographie, c’est pour élargir le moi jusqu’à ce qu’il embrasse toutes les autres vérités, jusqu’à ce qu’il saisisse – à bras l’esprit – tous les doutes possibles.

Une euphorie toujours reconnaissante dans l’âme.



J’ai rencontré Youssef un matin de septembre au c½ur de la terre bruyante. J’ai tout de suite vu en face de moi l’homme blessé qui exulte de son état de patience. C'est-à-dire l’homme jailli de l’horizon d’un poète tel qu’il peut être pris à l’aube d’un violent désir de communion. Il communique-par-dessus le trouble des mots – avec la voix pleine, sans strate de pause, à la source d’une parole d’amitié furieuse, exaltée. Et il parlait, tissant avec ses mains des n½uds de présence et d’oubli avec l’écart de l’irréel, étant naturellement assis sur le point culminant du verbe. Il a le don des récits tissés dans le fil d’Ariane. Il en possède l’image, la structure, la configuration, le souffle, le sens et la trace. Toute la poésie de Y. Rzouga repose, entre autres dilemmes, sur cette recherche obsédée, inquiète, rageuse, de la trace qui libère. Qui embrasse les confluences, reconstruit les routes qui mènent à la refondation de l’homme.
Trace aussi de l’éboulement et de l’ébranlement de l’angoisse et du tressaillement au souvenir de toutes les défaites de l’homme… Et fixation sur l’arbre qui sauve, sur la trame qui recolle, sur le désir qui assure la jonction. Le poète est foncièrement habité par une tension permanente .Pathétique et candide.
... « la poésie, dit-il, doit remonter à la source même de l’être pour générer la substance ou la monade du langage fondateur d’une nouvelle vision du monde ; elle doit créer de nouveaux liens, un autre univers de sens. Et pour ce faire, le langage poétique doit s’éprouver, se forger à l’étant du rêve. Le monde rêvé, c’est cette nouvelle fonction Orient / Occident qui ne s’embarrassera d’aucune frontière, d’aucune entrave. Ce que j’ambitionne de saisir, c’est ce point lumineux qui assure la vie symbiotique, totale, euphorique, frénétique. Dans l’arc-en-ciel des langues et des identités, le langage est étreinte suprême, creuset d’un devenir significatif de tous les espaces : rêves, désirs, enfance, mouvements et états de bonheur tels qu’ils seront libérés de tous les engourdissements, tels qu’ils seront projetés sur tous les élans et toutes les stases de l’existence.

Toutes les langues sont miennes, toutes les images, toutes les expressions, tous les mots. On me reproche, par exemple, l’introduction d’expressions modernes dans la langue poétique arabe : Quand on a une langue qui ne participe plus à l’évolution de l’histoire humaine, il faut absolument lui injecter le sang cosmique. Le devoir du poète est d’aller même plus loin : changer la structure de nos mythes afin de transformer la structure de notre pensée. Les mythes et les contes ne sont point un simple jeu de l’esprit imaginant, loin s’en faut. Moi je fais recours aux mythes – ceux représentatifs de l’imaginaire oriental comme ceux de l’occident – afin de briser la logique fondatrice des conflits et proposer une vision symbiotique du monde. Sur un autre registre théologique, par exemple, ne trouvez-vous pas aberrant qu’un même Dieu envoie – selon la croyance ou l’interprétation abusive et détournée de faux exégètes – plusieurs discours de consistance et de sens différents, voire opposés à l’homme terrestre qu’il a créé ? D’un seul Dieu, l’on ne peut recevoir qu’un seul message ! les conflits des religions sont une supercherie de l’histoire inventée par les politiciens. Tout poète doit s’atteler à reconstituer le puzzle de la condition humaine aujourd’hui basée sur la fatalité effroyable des guerres. Remontez à la source de tout processus, vous découvrirez que les concepts d’orient et d’occident sont établis sur des raisonnements anachroniques, fruit d’une illusion nourrie par l’imaginaire des politiciens et des économistes. C’est pour cela que je dis que le poète doit retrouver son prestige et son élan. Savez-vous que lorsque j’ai écrit le premier vers de ma destinée poétique, c’était, avant toute chose, pour transformer ma conviction spirituelle en une foi poétique : La lumière de la poésie se nourrit, en définitive, à une même source fondamentale qui ne peut être ni occidentale ni orientale. Une même source humaine. Abou Nawas et El Maâri sont aussi proches de moi qu’Edgar Allan Poe et Ekelöf. Et je lis Tagore(12) avec la même passion profuse que me transmet le texte d’Aboulkacemn Chabbi. L’ethnie n’est en réalité qu’un simple épiphénomène ; l’essence se trouve ailleurs. L’essence de l’homme réside dans la culture en général, dans la poésie en particulier, c’est pour cela que je dis que le moment est maintenant propice au retour des poètes. Ceux là sont les seuls capables à restituer la mémoire vivante du monde. Et l’on continue à édifier des murs de séparation entre les peuples et entre les hommes alors que dès le 10ème siècle av JC, les valeurs orientales (grâce aux navires de Salomon et des Phéniciens) étaient bien présentes au pays des Ibères, à Tarshish. Ainsi soit-il : l’Espagne c’était déjà l’Orient ! Des dizaines d’autres exemples peuvent étayer ma thèse, il suffit de fouiller dans la mémoire du monde. Il me plait énormément d’entrer dans les pays de tous nos ancêtres, je les revendique tous puisque la terre est ma patrie. Et dans sa matrice, je perçois Hésiode(13) aussi intensément qu’Ekelöf pour bien me représenter le mythe de la terre, du chaos et de l’Amour. Une religion universelle de l’Amour a déjà été perçue par le grand Ibn Arabi. Mais encore, faut-il repenser la mythologie ... »

Youssef Rzouga a rêvé Ekelöf. Il l’a rêvé comme un profond ressourcement de l’âme dans la plénitude de son existence intérieure. Il l’a rêvé à travers un je multiple, c'est-à-dire à travers un « cube avec ses angles et ses faces, un écran, un projecteur de mille pleins et déliés : un jeu de construction qui se monte et se démonte au gré des écarts » (Chantal Morcrette).
Ekelöf a rêvé Rzouga. Il l’a rêvé comme une interrogation irrémissible, urgente, imminente, révélatrice d’un nouveau monde possible. Car son désir et sa soif de profondeur n’avaient pas de limite, lui qui avait saisi la terre comme le souffle d’un perpétuel voyage entre l’être de l’ici et celui de l’ailleurs, jusqu’à parvenir au point suprême de la rencontre dans l’élévation mystique de la parole nocturne. Le poème devient révélation, point d’embrassement entre vie et mort.
Mais Rzouga sait que l’être doit sa survie au désir suprême des rencontres. Et que toute poésie doit s’édifier dans la vision d’une quête perpétuelle de contact, de fusion, de symbiose. Nous = l’autre, telle est la vérité suprême à dévoiler. C’est la condition sine qua non d’un monde «euphorique » c'est-à-dire capable de jouir, c'est-à-dire de positiver le bonheur et de nullifier le chaos.
Le monde actuel est fondé sur les discontinuités brutales, les ruptures capitales, les divergences meurtrières. Le poète revendique le retour aux sources de la jonction suprême, seule voie capable de générer le grand arbre de la vie.
Sa démarche emprunte la voie des cimes ; elle n’est point réductible à l’état de joie simple et accidentelle qui serait significative d’une fuite de nos responsabilités face à l’insoutenable complexité de nos rapports avec le monde ; c’est au contraire, la voie idéale d’accès à la vraie liberté de l’être.
La démarche du poète emprunte la voie des cimes ; elle nous rappelle celle du grand mystique Jalel Eddine Rûmi(14) :
« Je ne suis ni chrétien, ni juif, ni zoroastrien, ni musulman,
ni d’orient ni d’occident..
Ma place est d’être sans place...
Je suis enivré de la coupe d’amour...
Je n’ai d’autre fin que l’ivresse et l’extase.... »
La démarche du poète emprunte la voie de la raison aussi ; elle nous rappelle celle d’Abou El Walid Ibn Rushd (Averroès(15) qui introduisit Aristote dans la conscience européenne en témoignant de « la profonde interférence entre raison grecque et foi musulmane, ces deux mondes, écrit-il, n’ont pas été séparés, comme l’a longtemps prétendu la légende de l’Occident ; ils ont été au contraire en profonde intéraction ».
Vivre au carrefour des lieux et des temps multiples, c’est repenser un monde dans sa réalité dynamique de juxtaposition, de transactions et d’échanges perpétuels entre et par-dessus les dichotomies. Dans une perspective ouverte et dialogique, voire symbiotique.
Avec l’incroyable richesse de son histoire millénaire faite de croisements et de communications, de transmissions et de transmutations, le Nord de l’Afrique offre, dans son rapport avec l’autre du Nord, les conditions idéales à l’extension et à l’expansion de l’imaginaire transnational. Ce rapport fondamental offre une diversité de n½uds qui pourraient être philosophiques, religieux, linguistiques, rompus à la conscience de leur historicité. Ce rapport, cet espace, ce lien sont aussi une métaphore, une façon de repenser poétiquement le monde.

Pour un nouvel ordre poétique



« Dichcterisch Wohnt der Mensh » : En poète, l’homme habite cette terre, écrivait Hölderlin(16). Habiter est un acte qui dépasse bien loin l’idée de l’avoir pour confiner à l’être et au sentir.
Plus que jamais, aujourd’hui nous sommes appelés – les poètes en particulier – à construire de nouveaux rapports d’habitations, c'est-à-dire un nouveau monde d’être, d’exister et de sentir. Non par le recours à des notions économiques ou politiques – dont les inventeurs visent d’ailleurs le maintien des mêmes rapports d’hégémonie et poursuivent la réalisation des mêmes objectifs de gain et de profit – mais par l’invention d’un nouveau langage, seul garant d’un nouvel habitat pour l’homme.
Youssef Rzouga appelle, dans ce contexte, à un nouvel ordre poétique.
Alors que ses prédécesseurs ont cru pouvoir transformer la poésie (arabe en particulier) en bouleversant le rythme classique d’ El Khalil(17), notre poète se donne pour horizon, se fixe pour objectif de réécrire le n½ud de la vie, c'est-à-dire de le défaire puis de le renouer. Faisant le constat d’un monde qui tourne à vide et qui passe tout à fait à côté de la vraie vie, il s’attelle – rageusement, frénétiquement, mû par une conviction des plus intimes et des plus obstinées – à en défaire les réflexes conditionnés.
Hera Vox écrit à ce sujet : A côté du « basic instinct » qu’il énonce, à côté du profane et du sacré qu’il coalise, Youssef Rzouga appose le rythme d’un « corps scientifique » Il s’appuie sur la mathématique, la physique, la chimie, la biologie, l’informatique, la technologie, créant des relations originales entre le littérature et le scientifique, au profit d’un imaginaire poétique moderniste. Il s’adapte aux exigences d’un entre deux siècles technocratique, pragmatique, mondialisé et transculturel.
Il invente pour ce faire, un autre mode d’écriture poétique à rythme « occiriental »**** : « Insérer les mesures d’Al-Khalil Ibn Ahmad (l’ancêtre de la métrique arabe depuis des siècles) dans un poème ou « occirième » d’expression française et rythmer ses vers libres selon les pieux (awteds) de la rythmique orientale, explique le poète, n’est qu’une contribution à la recherche d’une alternative rythmique (dite occirientale) qui initie au début de ce troisième millénaire un pont d’une nouvelle sensation entre Orient et Occident ».
Projet ambitieux dont l’esprit est de « coaliser par la poésie Orient et Occident, écrit encore Héra Vox, afin de faire danser ensemble leurs poètes par une co-création issue de deux langues ».
Expérience intéressante, féconde à plus d’un titre, dont notre poète entrevoit les prémisses et les perspectives grâce à la découverte de la poésie de Gunnar Ekelöf. Et qui sera approfondie dans « Yotalia » : vision duelle et dialogique à l’isthme de l’Orient de l’Occident :
Youssef Rzouga :
« Ecrire le corps :
Ecrire le rythme
d’un certain Nord
Ecrire le rythme
d’un certain Sud
Ecrire à mi-mot
l’autre
son environ ...
Ecrire le pont
Et le sens d’un vent .
Ecrire le sens
Inverse de l’impossible
Et faire le flou souvent
Héra Vox :
« Quand le Nord et le Sud
Se rejoignent
C’est la Méditerranée entière
Qui déborde
Libre comme Femme
Captive d’aucun Tabou »

Texte rédigé par Hassen Bahani
Le 16 octobre 2006




Appendices



Repères :




*Gunnar Ekelöf, maître de la poésie suédoise moderne, est né à Stockholm en 1907. Dans sa jeunesse, il étudie les langues, la philosophie et la poésie mystique des pays du Moyen-Orient. En 1929, à Paris, il découvre le surréalisme et traduit en suédois les poètes français, notamment Baudelaire, Rimbaud, Apollinaire et Desnos. Son premier recueil de poèmes paraît en 1932, suivi d'une dizaine d'autres. C'est ensuite la période des voyages dans les pays qui bordent la Méditerranée. En 1965 il compose, en Turquie, vingt-neuf poèmes du premier volume de la trilogie qui forme la partie centrale d'une ½uvre qui marque l'un des sommets de la poésie contemporaine. Gunnar Ekelöf est mort à Sigtuna en 1968.
- « Tard sur la terre » est considéré comme le premier recueil suédois de textes surréalistes.
-L’½uvre de Gunnar Ekelof mêle des poèmes d’une immédiate simplicité à un lyrisme expérimental, souvent d’inspiration orientale.
-Le poète « brisait les lettres de l’alphabet » en quête d’une langue nouvelle s’accordant mieux à une réalité éclatée.
¼uvres traduites
DIWAN SUR LE PRINCE D'EMGION [1973], trad. du suédois par Carl Gustav Bjurström et André Mathieu , préface de Georges Perros, 104 pages,. Collection Du monde entier, Gallimard.
GUIDE POUR LES ENFERS (DIWAN, III) [1979], trad. du suédois par Carl Gustav Bjurström et André Mathieu. Poèmes précédés de Gunnar Ekelöf et de Le Voyant et la Vierge par Pierre Emmanuel , 128 pages. Collection Du monde entier, Gallimard .
LA LÉGENDE DE FATUMEH (DIWAN, II) [1979], trad. du suédois par Carl Gustav Bjurström et André Mathieu , 96 pages. Collection Du monde entier, Gallimard.
TARD SUR LA TERRE suivi d'UNE NUIT À L'HORIZON [1988], trad. du suédois par Jean-Clarence Lambert , 112 pages. Collection Du monde entier.

**Youssef Rzouga | est né le 21 mars 1957 à Ksour Essef, Mahdia, Tunisie. Poète méditerranéen polyglotte ,il est l'initiateur d'un rythme occiriental axé sur l'insertion de la métrique arabe dans la poésie française et l’une des figures les plus représentatives de la poésie moderne. Il s’agit, selon les critiques, d’une voix originale, singulière et prometteuse.
Youssef Rzouga a fait ses études à la faculté des Lettres et Sciences Humaines de Tunis( jusqu'en 1980 ), puis à l'Institut de Presse et des Sciences de l’Information. Il travaille actuellement dans le champ du journalisme culturel. Ses premiers poèmes, où se laisse entrevoir une aptitude remarquable à la création d'images poétiques originales, datent du début des années 1970. Mû par un profond sens esthétique, il s'emploie à explorer de nouvelles voies d'expression et à adapter ses vers aux préoccupations de son époque. Ses dernières productions témoignent d'une volonté de transgression des lois des genres consacrés, allant jusqu’à mêler ostensiblement la poésie à la prose. De par ses contacts suivis avec les jeunes poètes dans le cadre de ses activités au sein du club du Mercredi littéraire à l'espace Tahar Haddad ou à la tête des pages culturelles du journal Alayyam, Youssef Rzouga est sans conteste le poète qui a eu le plus d'influence sur la génération des années 1990.
S'appuyant sur un savoir encyclopédique (mathématique, physique, biologie, informatique..) et recourant à une méthode de poétisation originale, il a établi des relations insoupçonnées entre les termes scientifiques et les termes littéraires au profit d'un nouvel imaginaire poétique moderne, voire réconcilié avec l'exigence d'un nouveau millénaire sous tous ses aspects transculturels et mondialisés.
Bibliographie
En arabe
Je vous transcende par mes tristesses(1978)
L’idiome des branches dissemblables (1982)
Le programme de la rose (1984)
L’astrolabe de Youssef le voyageur (1986)
Le loup dans le verbe (1998)
Le pays d’entre les deux mains (2001)
Fleurs de dioxyde de l’histoire (2001)
Proclamation de l’état d’alerte (2002)
Le papillon et la dynamite (2004)
Yogana (Le livre du Yoga poétique) (2004)
¼uvres complètes (Première Partie) (2003)
The ground zéro (2005)
La plastique de l’âme suivi de l’Epistémè de l’Issue (2003)
Rhapsodies d’un Troubadour (inédit)
Le Scandale narcissique(inédit)
En français
Le fils de l’araignée - Préface : Chantal Morcrette (2005)
Yotalia (en cocréation avec Hera Vox ) - Préface : Chantal Morcrette (2005)
1001 poèmes (1er livre : 101 poèmes en cocréation avec Hera Vox ) - Préface : Chantal Morcrette (2005)
Le jardin de la France - Préface : Mondher Chafra (2005)
Tôt sur la terre :Odes à Horace/Opéra d'Afrique- Préface: Aude Richeux-Diano (2006)
Traductions
En français
L’image a vieilli par Jean Fontaine suivi de Poèmes par Hédi Khélil (2005)
Les griffes des eaux par Walid Soliman (2005)
En anglais
Deux feux d’enfer au c½ur (Two hells in the heart par Khawla Kreech)(2005)
La Paix sur Terre (Pacem in Terris avec la collaboration du poète Philip Hackett) (2005)
En russe
Les poètes de l’Afrique du Nord
Récits pour enfants (Science-fiction)
Et l’orange s’envola (1992)
Romans
L’archipel (1986)
Matriochka ou Un monde à part (Roman des Résidus Recyclés, 2006)
Autobiographie
Vie d’une certaine limite (inédit)
Approche critique
Les pieux de la rythmique arabe : Vers un rythme occiriental 2005
Autour de lui :
Khaled Mejri et Chawki Anizi, Le jardin et ses environs (Aspects de l’itinéraire du poète Youssef Rzouga
Maher Derbel et Abderrazek Kolsi, La mondialisation et le langage poétique à travers « Les fleurs du dioxyde de l’histoire » (dans le cadre du livre sur « La poésie tunisienne contemporaine »)
Le troubadour des temps modernes, sous la direction de Walid Soliman(Tunis 2004)
Ezzeddine Madani, Le langage contemporain envahit la poésie dans « La proclamation de l’état d’alerte » de Youssef Rzouga
Hafedh Mahfoudh, La porte entrouverte (Essai critique autour du recueil « Fleurs du dioxyde de l’histoire »)
Chamseddine El Ouni, Texte à bas le masque, Epistémè de Youssef Rzouga comme modèle
Houyem Ferchichi, L’orchestre du Poète dans « Proclamation de l’état d’alerte »
Mourad Ben Mansour, Poésie de Youssef Rzouga : Langage de révolte, thème d’anticipation
Abdelhamid Chkil, Le croissant vers l’Orient, le croissant vers l’Occident, 2005
La poésie arabe contemporaine : comment la déchiffrer - Déclaration de l’état d’alerte de Y. Rzouga comme modèle2005
Aude Richeux-Diano, La poésie de Youssef Rzouga ou la recherche du lien authentique,Imagine TN, 2006.
Ella France | Biographie |YR : pour un nouvel ordre poétique, Imagine TN, 2006.
Hassen Bahani, D’Ekelof à Rzouga : la joie d’être là, Imagine Tn, 2006.

(*)Ksour Essef est une ville tunisienne située sur la côte du Sahel (à 211 kilomètres de Tunis).
Le nom de la ville signifie « châteaux des faucons » en raison de la tradition locale de la chasse au faucon que l'on retrouve dans plusieurs villes comme Mahdia (située à 12 kilomètres de Ksour Essef). La date de la création de la ville coïncide avec l'arrivée des Hilaliens en 1050. Dès lors, une partie de la population est d'origine berbère mais la majorité devient arabe.
Ksour Essef possède une belle plage qui porte le nom de Salakta. On y trouve également un port de pêche et un musée qui dévoile les richesses de son passé.
L'économie de la ville est basée surtout sur l'agriculture, la pêche et l'émigration. En effet, les migrants participent directement à son essor économique en y investissant (construction de maisons et installation de commerces et d'industries).
Ksour Essef est la ville natale du poète Youssef Rzouga.



(1)Mohammed Ibn ’Arabî
Connu sous son seul nom de Ibn ’Arabî (1165, Murcie dans le pays d'al-Andalûs - 1240, Damas). Appelé aussi « Cheikh al-Akbar » (« le plus grand maître », en arabe) , un mystique dans l’âme, auteur de 846 ouvrages. Son ½uvre aurait influencé Dante et Saint-Jean-de-la-Croix. Dans ses poèmes il traite de l'amour, de la passion, de la beauté et de l'absence.
En 1179, il rencontre le philosophe Averroès à Cordoue. Cette rencontre avec le vieux philosophe marqua le jeune mystique (il n'a pas alors 14 ans) qui, malgré son inexpérience, perçut immédiatement la faiblesse théologique de la philosophie dont la voie ne mène pas à la Révélation. Ibn ’Arabî se forma lui-même aux théologies. Il acquit une science considérable par la lecture de différents maîtres.
En 1196 à Fès, il est dépositaire de la révélation du sceau de la sainteté muhammadienne. Il dit avoir reçu les Gemmes de la sagesse d'un trait, réveillé une nuit par Mahomet. La sagesse est représentée par une pierre dont la forme représente la Tradition ; alors que la pierre est la même pour tous, elle est taillée différemment selon les formes prophétiques dictées à Abraham, Jésus ou Mahomet.
En 1203, il entame les Conquêtes spirituelles mecquoises. À la Mecque, il écrit son ouvrage métaphysique majeur : les Illuminations de la Mecque (ou : Illuminations mecquoises). Il y décrit les aspects spirituels et métaphysiques du soufisme. Conjuguant une extrême rigueur dans la conception et un travail visionnaire, cet ouvrage vaut à Ibn ’Arabî son surnom de fils de Platon.
¼uvres
C'est à l'Espagnol Asin Palacios que l'on doit la découverte des ouvrages d'Ibn Arabi, ainsi qu'à Louis Massignon et Henry Corbin sans les travaux desquels l'½uvre d'Ibn Arabî serait demeurée à jamais oubliée en Islam. C'est grâce à ces trois chercheurs que l'enseignement du Maître de Murcia a pu renaître en terre d'Islam et se faire connaître en Occident.
La vie merveilleuse de Dhû-l-Nûn l'Egyptien
Le livre de l'Extinction dans la Contemplation
Le Traité de l'Amour
Le Traité de l'Unité
Le Voyage vers le Maître de la Puissance
Les Soufis d'Andalousie
Les Illuminations de la Mecque
La Sagesse des Prophètes
L'Alchimie du Bonheur parfait
L'interprête des ardents désirs
L'Arbre du Monde
"Le dévoilement des effets du voyage", édition du texte arabe, traduction introduction et notes de Denis Gril, Editions de l'Eclat, 1994
"La production des cercles", édition du texte arabe Nyberg, traduction et introduction Paul Fenton et Maurice Gloton, Editions de l'Eclat, 1996.
Le livre des chatons des sagesses',' Editeur AL-Bouraq, 1999
Livres
Le Maître d'amour, illustrations de Nja Mahdaoui, texte de Rodrigo de Zayas - éd. Albin Michel
Ibn Arabi et le voyage sans retour, Claude Addas, éd. du Seuil, collection Point-Sagesse;
Ibn Arabi ou la quête du souffre rouge, Claude Addas [1989] , Collection Bibliothèque des Sciences humaines, Gallimard.
Le dévoilement de l'effet du voyage Trad de Denis Gril, édité aux Editions Lyber.

(2) Mansur al-Hallaj : né vers 857 , mort en 27 mars 922 à Bagdad, était le plus subtil des mystiques du soufisme, auteur d'une ½uvre abondante tendant à renouer avec la pure origine du Coran et son essence verbale et lettrique.
Quête de « l'Alphabet Equatorial », sa poésie est considérée, encore aujourd'hui, comme une hérésie par de nombreux islamistes, alors qu’ il s'agit en fait d'une recherche de l'Absolu et de son langage. Son approche du texte coranique est essentiellement liée à l'essence des lettres dont il préconise qu'elles sont l'expression même de la pensée divine. C'est à Louis Massignon que l'on doit la redécouverte, en Islam, des textes oubliés d'al-Hallaj(dont il fut également le premier traducteur en langue européenne).
Né près de Tur en Iran, son grand-père, selon la tradition, était un zoroastrien et descendait de Abu ayub, un compagnon de Mahomet. Son père vint travailler dans le ville de Wasit et se lança dans le commerce de la laine. Son nom signifie : le cardeur de laine.
Peu satisfait de l'enseignement traditionnel du Coran et attiré par une vie ascétique, il fréquenta des maîtres du soufisme comme Sahl at-Tustari, 'Amr ibn 'Uthman al-Makki, et Abu al-Qasim al-Junayd alors hautement respectés.
Sahl at-Tustari fut son premier maître qui vivait seul à Tustar dans le Kazakhstan. Il épousa la fille du maitre soufi Abu Ya'qub al-Aqta'.
Al-Hallaj devint prédicateur en Iran, puis en Inde et jusqu’aux frontières de la Chine. Rentré à Bagdad, il est suspecté aussi bien par les sunnites que par les chiites pour ses idées mystiques (recherche de l’amour divin et de l’union de l’âme et de Dieu) et son influence sur les foules. Il est faussement accusé d'avoir participé à la révolte des Zanj, mais sa condamnation proprement dite résulte principalement d'une accusation d'apostasie. Il est condamné à mort et supplicié à Bagdad le 27 mars 922.
¼uvres
Diwan, poèmes traduits et présentés par Louis Massignon, éd. du Seuil, 1955.
Poèmes mystiques traduits et présentés par Sami-Ali, éd. Albin Michel, 1998.
Ouvrages sur Al Hallaj
Louis Massignon, Akhbar Al-Hallaj, recueil d'oraisons et d'exhortations du martyr mystique de l'Islam, édition J. Vrin, collection Etudes musulmanes, 1975. Edition bilingue.
Louis Massignon, Essai sur les Origines du Lexique technique de la mystique musulmane, éditions J. Vrin, Paris 1954.
Jacques Keryell, Jardin Donné, Louis Massignon à la recherche de l'Absolu, éd. Saint-Paul, Paris, 1993.
Jad Hatem, Satan, monothéiste absolu selon Goethe et Hallaj, Éditions du Cygne, Paris, 2006.

(3) Emmanuel Kant est un philosophe allemand. Il est né le 22 avril 1724 à Königsberg, capitale de la Prusse orientale, et y est mort le 12 février 1804.

(4)Rainer Maria Rilke est un poète autrichien, né le 4 décembre 1875 à Prague, mort le 30 décembre 1926 à Montreux, en Suisse. Il vécut à Veyras de 1921 à sa mort.
Pensionnaire dans une école militaire avant d'être renvoyé en 1891 pour inaptitude physique, il étudie alors le commerce avant de revenir à Prague où il exerce le métier de journaliste et écrit ses premières ½uvres.
En 1896, il part pour Munich et rencontre un an plus tard Lou Andreas-Salomé, son aînée de près de 15 ans. Son amour enflammé se transforme progressivement en amitié réciproque et en admiration mutuelle se poursuivant jusqu'à la fin de sa vie. En 1897, il change de prénom : de René Maria, il devient Rainer Maria. Il voyage en Italie puis en Russie avec Lou et son mari. Il rencontre à cette occasion en 1899 Léon Tolstoï.
En 1901, il épouse Clara Westhoff, une élève d'Auguste Rodin, avec qui il aura une fille. Le couple se sépare un an plus tard et Rilke rejoint Paris où il devient en 1905 secrétaire de Rodin. Il rompt avec ce dernier et voyage dans toute l'Europe et au-delà de 1907 à 1910 (Afrique du Nord, Égypte, Berlin, Espagne, Venise, Aix-en-Provence, Arles, Avignon). Il abandonne peu à peu la prose pour se consacrer à la poésie, plus apte selon lui à restituer les "méandres de l'âme".
En 1910, il fait la rencontre décisive de la princesse de Thurn und Taxis, à Duino, sur les bords de l'Adriatique. Elle l'hébergera fréquemment et sera son mécène jusqu'en 1920. Pour elle, il composera son chef d'½uvre, les Élégies de Duino, suite d'élégies empreintes d'une mélancolie lumineuse.
Il est mobilisé dans l'infanterie lors de la Première Guerre mondiale mais revient rapidement à la vie civile.
À partir de 1919, il rejoint la Suisse et compose plusieurs recueils de poésies en français. En 1921, un industriel du Winterthur, Werner Reinhart, lui achète la tour isolée de Muzot, près de Sierre, dont il fera sa résidence.
Il décède d'une leucémie en 1926 et est inhumé à Raron dans le Valais.

(5) Pierre Klossowski : est né à Paris en1905 et y est décédé le 12 août 2001 ; écrivain français ;
auteur d'½uvres romanesques, il fut également essayiste, traducteur et peintre.

(**)Avec La Légende de Fatumeh, ce recueil de poésie traduit une interrogation passionnée, sur un mode parfois ésotérique, faisant appel aux mystiques orientales, d’un grand voyageur autour du bassin méditerranéen.

(6) Edgar Allan Poe (1809-1849) est un écrivain américain, poète, romancier et nouvelliste du XIXe siècle. Il a aussi travaillé comme critique littéraire et éditeur bien qu'il soit plus connu en tant qu'auteur. Il représente, avec Washington Irving, James Fenimore Cooper, Nathaniel Hawthorne, Herman Melville, Walt Whitman, Mark Twain et Henry James, l'un des plus célèbres et remarquables écrivains de la littérature américaine du XIXe siècle.

(7)Vladimir Vladimirovitch Mayakovski, né le 7 juillet 19 juillet 1893 à Bagdadi, aujourd'hui Maïakovski, Géorgie – mort suicidé le 14 avril 1930 à Moscou) est un écrivain russe d'origine cosaque.
Il a été un des fondateurs du futurisme russe, plus particulièrement du cubo-futurisme (l'autre branche étant l'ego-futurisme).

(8) Thomas Stearns Eliot (26 septembre 1888 - 4 janvier 1965). Poète, dramaturge, et critique moderniste américain naturalisé britannique. Il a remporté le prix Nobel en 1948.

(9)Abū Nuwās], né entre 747 et 762 à Ahvāz (Iran) et décédé vers 815 à Baghdād (actuel ‘Irāq), est un poète arabo-persan.
Il est né d'un père arabe et d'une mère persane. D'un milieu persan mais arabisé, il passe toute sa vie à Baghdād. Ses contacts avec des mécènes, tels les vizirs barmécides, et son aura scandaleuse lui valent les foudres du calife Hārūn ar-Rachīd.
Ses thèmes privilégiés versent dans une tendance hédoniste aux relents mystiques : amour du vin, des garçons et de la chasse, libertinage mais aussi angoisse de la mort et du vieillissement. Son esprit critique se tourne notamment contre les institutions religieuses. Il est bercé par la poésie bédouine préislamique et les chansons rimées précieuses et maniéristes.
Considéré en son temps comme le plus grand poète arabe classique, il est aujourd'hui très populaire dans les pays de langue arabe

(10) Abu-l-Ala al-Maâri (973-1057) : grand poète arabe, connu pour sa virtuosité et pour l'originalité et le pessimisme de sa vision.
Al-Ma'arri était un descendant de la tribu de Tanukh. Il naquit dans la ville syrienne de Ma'arrat An-Nu'man , près d'Alep. Une maladie d'enfance le laissa pratiquement aveugle. Il étudia à Alep, Antioche, et à Tripoli au Liban avant d’entamer sa carrière littéraire, soutenu par un petit revenu privé. Ses premières poésies furent rassemblées dans le Saqt az-zand de ("l'étincelle d'amadou"), qui jouissait d'une grande popularité.
Après environ deux ans à Bagdad, Al-Maari revint en Syrie du nord en 1010, en partie du fait de la mauvaise santé de sa mère. À Bagdad, il avait été d'abord bien reçu dans des salons littéraires prestigieux ; mais quand il refusa de vendre ses panégyriques, il ne put trouver de mécène sûr. Il renonça à la richesse matérielle et se retira dans une habitation reculée, y vivant dans des conditions modestes. Localement, Al-Maari jouissait d’une incontestable ascendance morale et de nombreux étudiants vinrent étudier avec lui. Il entretint également une correspondance active.
Al-Maari écrivit un deuxième recueil de poésies plus original, Luzum ma lam yalzam ("la nécessité inutile"), ou Luzumiyat ("les nécessités"), se rapportant à la complexité inutile de l'arrangement des rimes. L'humanisme sceptique de ces poésies était également apparent dans la Risalat al-ghufran (traduction anglaise de G. Brackenbury, Risalat ul Ghufran, a Divine Comedy, 1943), dans lequel le poète visite le paradis et rencontre ses prédécesseurs, poètes païens qui ont trouvé le pardon. Cette dernière ½uvre a suscité quelques suspicions chez les musulmans. On a d'ailleurs pensé de lui qu'il était marqué par le doute.
L'ouvrage Al-Fusul wa al-ghayat ("Paragraphes et périodes"), une collection d'homélies en prose rimée, fut même traité de parodie du Coran. Bien qu'il ait été l'avocat de la justice sociale et de l'action, Al-Maari pensait que les enfants ne devraient pas être conçus, afin d'épargner aux générations futures les douleurs de la vie.

(11) Aboul-Qacem Chabbi, né en février 1909 à Tozeur et décédé le 9 octobre 1934 à Tunis, est un poète tunisien , considéré unanimement comme le poète national de la Tunisie.
Chabbi naît au sein d'une famille lettrée et noble. Son père, zitounien de l'Université al-Azhar du Caire, est un cadi. Cette fonction amènera la famille chabbi à parcourir la Tunisie : Siliana, Gafsa, Gabès, Thala, Medjez El Bab, Ras Jebel, Zaghouan, etc. Sa poésie gardera la trace de la variété de ces paysages, d'autant plus que le jeune garçon mène une vie plus contemplative que ses camarades , souffrant très tôt d'un c½ur fragile.
En octobre 1920, il doit suivre la voie tracée par son père : il entre à l'Université Zitouna à Tunis et habitera dans des médersas pendant 10 ans (jusqu'à son mariage). Alors que ses 3 frères cadets sont inscrits dans des écoles franco-arabes, Aboul-Qacem suit une formation dans un arabe pur et classique. Il apprend à connaître les auteurs occidentaux (Alphonse de Lamartine, John Keats, etc.) à travers les traductions arabes qu'il trouve dans la fréquentation assidue des bibliothèques de la Khaldounia (institut fondé par les nationalistes tunisiens) ou du Club littéraire des anciens du collège Sadiki. Il lit également les poètes arabes (notamment libanais) comme Khalil Gibran. Il participe aussi à l'effervescence de la jeunesse intellectuelle dans un climat de contestation de l'enseignement zitounien qui agite alors la capitale. Dès l'âge de 14 ans, Chabbi écrit ses premiers poèmes.
La rencontre de Chabbi à 18 ans, avec l'éditeur As-Snusi, qui tenait une sorte de cénacle littéraire dans son imprimerie, Dar al-Arab, sera importante. Celui-ci publie, l'année suivante (en 1928), une anthologie de la littérature tunisienne contemporaine en arabe où il consacre pas moins de 30 pages à son jeune ami : une somme de 27 poèmes. Echebbi, dandy et poète auquel les milieux intellectuels et artistiques s'intéressent, s’installe alors à l'hôtel et s'inscrit en cours de droit.
Le 1er février 1929, à la Khaldounia, Chabbi tient une conférence retentissante de 2 heures sur le thème de l'imagination poétique chez les Arabes dans laquelle le jeune homme de 20 ans, qui ne connaît aucune langue étrangère et n'a jamais quitté son pays, surprend par l'originalité de ses idées et l'audace de ses jugements :
« Les poètes arabes n'ont jamais exprimé de sentiments profonds car ils ne considéraient pas la nature avec un sentiment vivant et méditatif, comme quelque chose de sublime, mais plutôt comme on regarde d'un ½il satisfait un vêtement bien tissé et coloré ou un beau tapis, rien de plus. »

(12) Rabindranâth Thâkur dit Tagore (6 mai 1861 - 7 août 1941), est un compositeur, écrivain et philosophe indien dont l'½uvre a eu une profonde influence sur la littérature et la musique du Bengale à l'orée du XXe siècle et a été couronnée par le Prix Nobel de littérature en 1913.
Né à Calcutta, dans le Bengale occidental, quatorzième enfant de Debendranâth Tagore, l'un des fondateurs du mouvement Brahmo Samaj, et petit-fils de Dvârkânâth Tagore, Tagore a été élevé dans une famille d'artistes et de réformateurs sociaux et religieux opposés au système des castes et favorables à une amélioration de la condition de la femme indienne. Il fait ses études à Calcutta et en Angleterre. Puis rejoint le mouvement nationaliste après la partition du Bengale de 1906.
Tagore est connu en tant que poète plutôt qu'en tant que philosophe, mais ces deux arts sont rarement éloignés l'un de l'autre dans la civilisation indienne, et une philosophie implicite est présente dans la poésie de Tagore. Il s'intéresse aussi à l'éducation et à la pédagogie et en 1921, il rénove l'université Vishbabharati à Shantiniketan où un enseignement de la culture indienne est dispensé aussi bien à des Indiens qu'à des étrangers.
Traduite en français par André Gide, son ½uvre littéraire la plus connue en France est L'offrande lyrique. Tagore est l'auteur des paroles des hymnes nationaux de l'Inde et du Bangladesh).
Il a été le premier écrivain d'Asie à recevoir le prix Nobel de littérature en 1913.

(13) Hésiode : Poète grec du VIIIe siècle av. J.-C.
Les seuls faits authentiquement connus sur Hésiode sont les événements consignés dans ses poèmes. À trois reprises dans les Travaux et les Jours, il donne quelques éléments biographiques. (Il faut y ajouter quelques vers de la Théogonie).
Hésiode serait né à Ascra, un petit bourg de Béotie. Son père venait de Cumes en Éolie, contrée d’Asie Mineure située entre l’Ionie et la Troade. Nous ignorons son nom. La tradition lui donne celui de Dios, mais cela s’explique par une interprétation erronée du passage « Πέρση, δῖος γένος / Pérsê, dĩos génos » (Travaux, v. 299), compris comme « Persès, fils de Dios » au lieu de « Persès, noble fils ». Il y possédait une petite entreprise de cabotage, qui le ruina. Il traversa donc la mer et se fixa à Ascra où il acheta un lopin de terre, au pied du mont Hélicon. Il y épousa Pycimède, avec qui il eut deux fils : Hésiode et Persès.
Ascra était un endroit pauvre. Hésiode le décrit comme un « bourg maudit, méchant l’hiver, dur l’été, jamais agréable » (Travaux, v. 640). Au moment du partage de l’héritage de son père, il eut un grave différend avec son frère Persès, ce qui entraîna un procès. Les « rois » d’Ascra donnèrent raison à Persès. Celui-ci fit mal prospérer son bien et même périclita, ce qui le conduisit à quémander son frère, qui le repoussa. Furieux, Persès menaça Hésiode d’un autre procès, dont l’objet est inconnu.
Pour amener son frère à la sagesse, à une saine vie et à une bonne gestion de ses biens, Hésiode composa à son intention le poème les Travaux et les jours, ouvrage dont la partie didactique est axée autour de deux vérités morales : le travail est la grande loi de l’humanité ; celui qui travaille peut vivre décemment. Cet ouvrage fut écrit dans un contexte de crise agraire et de vagues de colonisation des Grecs à la recherche de nouvelles terres. Hésiode espérait résoudre le différend à l’amiable ; nous ignorons s’il réussit ou non.
Parallèlement à ses activités agraires, Hésiode était un aède, c’est-à-dire un barde composant ses poèmes pour un auditoire. À Chalcis en Eubée, il participa au concours de poésie organisé par les fils du roi Amphidamas pour célébrer les funérailles de leur père. Il remporta le prix grâce à un poème célébrant l’agriculture et la paix, recevant un trépied en récompense. Il le dédia alors aux Muses de l'Hélicon.
Il mourut à Ascra. Quand le village fut détruit par les Thespiens, ses habitants se réfugièrent à Orchomène. Aristote témoigne dans sa Constitution d'Orchomène que, suite à un oracle, les habitants de la cité recueillirent les cendres du poète et les placèrent au centre de leur agora, aux côtés du tombeau de Minyas, héros éponyme de la cité. De la sorte, les habitants firent d’Hésiode leur fondateur .
Hésiode s'est peint lui-même dans ses ouvrages comme partisan d’une existence sédentaire, observateur de la tempérance et de la justice, religieux jusqu’à la superstition, n’ambitionnant point la faveur des rois et se contentant de se rendre utile à ses concitoyens, à qui il prêchait la morale avec de beaux vers. Il est le créateur de la poésie didactique. Après sa mort, des statues furent érigées à Thespies, à Olympie ou encore sur l’Hélicon. Ses poèmes, chantés par les rhapsodes, devinrent très populaires et acquirent une grande renommée.
Hésiode a inspiré de nombreux poètes, parmi lesquels Virgile (dans ses Géorgiques), Caton l'Ancien (dans son De agri cultura) et Lucrèce.

(14) Jalāl al-Dīn Rūmī , (Balkh, 30 septembre 1207 - Konya, 17 décembre 1273) est un mystique persan qui a profondément influencé le soufisme. La plupart de ses écrits lui ont été inspirés par son meilleur ami, Chamseddine Tabrizi, qui était originaire de Tabriz, d'où Tabrizi.
Rûmi fuit avec sa famille devant le cataclysme mongol de 1220-1222 en Asie Centrale et s'installe à Konya, capitale des Seldjoukides de Roum (anciens territoires "romains", c'est-à-dire byzantins, en Anatolie), d'où son surnom de Roumi (romain, byzantin, Anatolien).
Il existe une demi-douzaine de transcriptions du prénom Djalal-el-dine, « majesté du culte » (de djalal, majesté, et dine, religion, mémoire, culte). Chemseddine peut être traduit par « soleil du culte ».
Rûmi a également repris à son compte les fables d'Esope, que La Fontaine retraduira à son tour en français. Les Iraniens d'aujourd'hui continuent d'aimer ses poèmes. Reconnu de son vivant comme un saint, Jalaleddine Roumi avait des prises de position assez révolutionnaires par rapport aux pouvoirs politiques et au dogme musulman.
On l'appelait aussi Mevlâna (ou Mevlana), « notre maître » en arabo-turc. Son nom est intimement lié à l'ordre des “derviches tourneurs” ou mevlevis, principale confrérie mystique de l'Islam, qu'il fonda dans la ville de Konya en Turquie.

(15) Abu'l-Walid Muhammad ibn Rushd de Cordoue (né en 1126 - année supposée de sa naissance - à Cordoue en Andalousie, Espagne - mort le 10 décembre 1198, à Marrakech, Maroc), latinisé en Averroès, de son nom complet Abū l-Walīd Muhammad ibn Ahmad ibn Muhammad ibn Ahmad ibn Ahmad ibn Ru¨d , est à la fois un philosophe, un théologien islamique, un juriste, un mathématicien et un médecin arabe du XIIe siècle.
Son ouverture d'esprit et sa modernité déplaisent aux autorités musulmanes de l'époque qui l'exilent comme hérétique et ordonnent que ses livres soient brûlés. Il demeura profondément méconnu jusqu'au XIIIe siècle où son importance fut cependant minimisée. Ce n'est qu'actuellement que les historiens de la philosophie reconnaissent son importance. Il commenta en entier les ½uvres d'Aristote : aussi le nommait-on le Commentateur.
Averroès cultiva la médecine, qu'il avait étudiée sous Avenzoar, et fut médecin de la cour de Maroc; mais il s'attacha plutôt à la théorie qu'à la pratique. Il eut en religion des sentiments très hardis, et fut quelque temps inquiété pour ce motif. Dans sa philosophie, il allia aux doctrines d'Aristote celles des Alexandrins sur l'émanation, et enseigna qu'il existe une intelligence universelle à laquelle tous les hommes participent, que cette intelligence est immortelle, mais que les âmes particulières sont périssables.

(16) Friedrich Hölderlin est un poète romantique allemand né le 20 mars 1770 et décédé le 6 juin 1843. Il est considéré comme l’un des plus grands poètes lyriques de langue allemande, ses ½uvres mêlent classicisme et thèmes chrétiens. Son roman Hypérion (1797-99), l'essentiel de ses écrits, exprime sa fascination pour la Grèce antique.
Durant sa vie, Hölderlin ne connaît ni stabilité ni bonheur, selon ses propres aveux: il manque d'argent et de reconnaissance. Les suspicions de la société à son encontre dans une affaire amoureuse avec une femme mariée le conduisent finalement à la folie (Je suis mortel, né pour l'amour et pour souffrir). Il rejette l'habituelle acceptation idéaliste de la félicité ; pour lui le plaisir existe, mais c'était de l'eau tiède sur la langue.

(16) Al-Khalil Bin Ahmed AL-FARAHIDI, (mort en 786), théoricien et inventeur de la métrique arabe basée sur le décompte syllabique : le vers métrique repose sur la combinaison de syllabes longues et brèves) . Célèbre philologue et lexicographe arabe, Al-Khalil Bin Ahmed Al-Farahidi conçut un nouveau système de tachkil. IL introduisit des signes vocaliques qui reproduisent en miniature la forme initiale ou une partie de certaines lettres. Ainsi, le signe "hamza" reproduit la moitié supérieure de la lettre "ayn" (sans la hampe). Le nouveau système s'est popularisé à travers le monde pour constituer un élément essentiel de l'identité de la langue arabe. Le développement de l’étude de la prosodie dans la poésie arabe est l’½uvre la plus importante d’Al-Farahidi. Il a été également le premier à croire en la spécialisation des élèves.

**** Inventé par Youssef Rzouga, le rythme occiriental se propose d’insérer les mesures d' Al-Khalil Ibn Ahmad (l'ancêtre de la métrique arabe depuis des siècles) dans des vers ou des occirièmes d'expression française ainsi rythmer les vers libres selon les pieux (awted) de la rythmique orientale , n'est qu'une contribution à la recherche d'une alternative rythmique (dite occirientale) qui initie au début de ce 3ème millénaire un pont d'une nouvelle sensation entre Orient et Occident.
Initier un rythme occiriental, loin de tout enthousiasme poétique, c'est nuancer un bleu d'un poème libre et inciter les poètes vers-libristes et/ou post-modernistes d'expression française à y occirientaliser leurs couleurs hurlantes sous l'impact d'un rythme oriental rêvé qui s'oriente vers le Nord pour s'infiltrer dans la forêt au travers des mots cadencés.
Entre vers alexandrins et vers iambiques, entre vers blancs et silences éloquents, entre syllabes fermées et syllabes ouvertes, entre diphtongues ascendantes fausses et diphtongues descendantes, entre Poètes et Cibles, un Temps se hausse et un trait d'union rythmique se hisse entre ORIENT et OCCIDENT : un rythme occiriental est ainsi né.

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Tag der Veröffentlichung: 13.01.2010

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